Accident DE LA CIRCULATION – PREJUDICES NON SOLLICITES

Par une décision en date du 20 avril 2023, Décision – Pourvoi n°22-11.525 | Cour de cassation, la Cour de Cassation est venue préciser que « s’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci, il n’est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits ».

Dans cette affaire, une victime d’un accident de la route avait été indemnisée en 2004 de son préjudice professionnel mais uniquement au titre de des pertes de rémunération subies lors de ses congés maladies et sur la perte de chance de bénéficier du déroulement prévisible de sa carrière

Considérant qu’elle n’avait pas été indemnisé de la perte de ses droits à la retraite, la victime avait donc sollicité dans un second temps l’indemnisation à ce titre.

Elle avait été déboutée par la Cour d’appel au regard du fait que d’après la juridiction, la victime « savait à cette époque que l’accident aurait une incidence sur sa situation professionnelle et donc sur le montant de sa retraite et que la répercussion de l’accident sur les droits à la retraite de la victime n’est pas un élément nouveau et ne s’analyse pas en une aggravation du préjudice qui a été antérieurement indemnisé ».

Pour la Cour d’appel, la demande devait donc être vue comme se heurtant à l’autorité de chose jugée.

Cette position a été censurée par la Cour de Cassation qui est venue rappeler que l’autorité de la chose jugée prévue à l’article 1355 du Code civil, n’empêche pas une victime de solliciter dans une instance différente, les préjudices non sollicités dans sa demande initiale.

Une fois de plus, la Cour de Cassation est ainsi venu rappeler que l’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’aux points qui ont été soumis à la juridiction qui a statué.

Cette position déjà précisée par le passé (Cass. Soc, 16 décembre 1980, n°78-14862 (ibid. CPAM); Cass. Civ. 2ème , 6 janvier 1993, 91-15.391., Publié au bulletin ; Cass. Civ. 2ème, 5 janvier 1994, n°92-12.185; Cass. Civ. 2ème, 17 janvier 2008, n°06-17.880, Inédit ; Cass. Civ. 2ème, 7 mai 2009, n°08-12.066, Inédit; Cass. Civ. 2ème, 21 novembre 2013, n°12-19.000, Inédit ; CA Lyon – ch. 06 – 15 mars 2012 / n° 10/08523 ; CA de Basse-Terre – ch. civile 01 2 mai 2018 / n° 16/01133) avait déjà permis à des victimes de solliciter :

– La réparation des préjudices sexuel et d’établissement ainsi que l’indemnisation relative à la nécessité d’aménagement d’un appartement et de l’acquisition d’un matériel spécialisé non inclus dans la demande initiale (Cass. Civ. 2ème, 5 janvier 1994, n°92-12.185) ;

– L’indemnisation de son préjudice économique pour la période postérieure à celle visée par un précédent jugement. (Cass. Civ. 2ème, 7 mai 2009, n°08-12.066 : En l’espèce, la victime avait initialement limité ses demandes pour une période de 5 ans à compter de l’accident)

– La réparation du préjudice de tierce personne sur lequel il n’avait pu être statué puisqu’il n’avait pas été inclus dans la demande initiale (Cass. Civ. 2ème, 21 novembre 2013, n°12-19.000, Inédit)

Cela se justifie pleinement au regard du principe de la réparation intégrale qui régit l’indemnisation des victimes d’un dommage corporel.

Dès lors, pour la Cour de Cassation, les victimes qui n’auraient jamais sollicité leur préjudice de retraite subi du fait de leur accident, sont désormais en droit de le solliciter dans un second temps.